Hoshaâna Rabba, par Emmanuel Rodriguez

À quoi ça correspond ?

Le jour d’Hoshaâna Rabba correspond au jour où les décrets fixés à Rosh HaShana (Nouvel an juif) sont scellés.

Ce jour est encore propice aux prières et aux pardons.

Il est dit, que c’est le dernier jour où les portes du Ciel sont ouvertes pour accueillir notre Techouva (repentance). 

Pendant la prière de Hoshaâna Rabba, on tourne autour de l’Arche, à sept reprises en tenant les quatre espèces dans la main.

Il faudra prendre cinq nouvelles branches de Arava (1), que l’on attachera ensemble, et avec lesquelles on frappera le sol.

Cet acte n’est précédé d’aucune bénédiction, car c’est une coutume instituée par les Prophètes.

L’habitude est de frapper la Arava directement sur de la terre, et non sur un sol carrelé́ ou bétonné́, en disant « Havit ‘havit véla barikh », qui signifie « frappe, frappe sans bénédiction ».

Cet usage quelque peu mystérieux recèle un sens profond et caché. Cependant, nous pouvons tenter d’appréhender deux aspects relatifs à cette coutume. 

Chacune des quatre espèces (Arbaa’t Haminim) se rattache à un membre du corps humain.

La Arava symbolise la bouche.

Le fait de retrouver une vie normale, nous redevenons vulnérable face à l’ange accusateur (Satan).

A Hoshaâna Rabba, nous perdons cette proximité particulière avec le Seigneur et lorsque nous frappons la Arava sur le sol, nous nous attaquons symboliquement à la bouche destructrice de Satan, afin qu’il ne puisse plus nous accuser devant l’Eternel.

La Arava est assimilée aux Réchaïm (2), car elle n’a ni goût ni odeur, à l’image de ceux qui sont devenus des rétrogrades et n’ont plus de pratiques.

Souccot marque l’unité́ du peuple. Dans cette période, les Justes désirent protéger leur âme spirituelle. Ces derniers sont alors jugés comme appartenant à une entité́ et leurs mauvaises actions ne sont pas mises en valeur. 

C’est le septième jour de Souccot, que l’on frappe la Arava sur le sol, ce qui signifie que nous nous désolidarisons des Rachaïm (les méchants), pour qu’ils assument les conséquences de leurs actes et de leurs choix. 

Shemini Atseret clôture les fêtes de Tishri 

A l’époque du Temple, chaque jour de Souccot était marqué par les 70 sacrifices de taureaux, pour les 70 nations. Mais le jour de Chemini Atseret, le sacrifice consistait en un seul et unique taureau. 

Pourquoi cette différence ?

Shemini Atseret clôture les fêtes de Tichri, durant lesquelles HaShem (D.ieu) était particulièrement proche de nous.

Alors, à l’image d’un Roi qui réunissant ses plus fidèles serviteurs avant que les festivités ne s’achèvent, D.ieu demande à Ses enfants de faire un dernier repas pour protéger ces derniers instants de proximité. 

Rabbi Yérou’ham explique que le fait de se quitter sur une fête, permet de garder une proximité affective et spirituelle, malgré la séparation physique.

Dans le Talmud (Torah orale), dans le contenu du traité sur la Souccah (chap. 55b), l’Eternel dit à Ses enfants : « Me séparer de vous M’est difficile, restez donc un jour de plus à Mes côtés ».

Ce verset soulève plusieurs interrogations. En quoi le fait de retarder le départ d’un être aimé facilite-t-il la séparation ? 

Lors de la fête de Souccot, D.ieu fixe les quantités d’eau qui tomberont durant l’année sur chaque territoire. Toutes les nations sont représentées et se voient octroyer une part de cette pluie. Chaque nation vient récupérer sa ration comme un dû, sans chercher à établir de contact avec leur bienfaiteur. 

D.ieu consacre un jour à Son peuple et leur octroie une bénédiction d’abondance avant qu’ils ne se séparent, selon l’ouvrage Chem MiChemouel (3). 

Comme un ‘Hatan (le fiancé) et une Kala (la fiancée)

D’après l’explication de Rav Zafrani, le verset dit « Véhayta Akh Samea’h ». Rachi interprète ces propos comme une promesse : « Et tu ne connaitras que la joie ». 

Le Talmud, dans le traité concernant la Soucca, explique qu’il s’agit ici d’un ordre divin, visant à inclure le jour de Shemini Atseret parmi les jours de joie et de festivités propres à la fête de Souccot. 

Ceci nous conduit à la question de la place du mot « Akh » qui signifie « seulement » ou « mais » en hébreu.

Ce terme marque bizarrement la restriction.

Alors, comment le Talmud a t-il pu déduire que « Akh » inclut le dernier jour de Souccot dans nos temps de joies ? A priori, cela semble contradictoire ! 

Le Gaon de Vilna (4) répond que pendant les sept jours de Souccot, plusieurs Mitsvot (5) sont à l’origine de notre joie : la Soucca, les quatre espèces, Sim’hat Beth Hachoéva, etc … Tandis qu’à Shemini Atseret, il n’y a rien de particulier, mais il nous reste la joie ! 

De son côté, Rav Pinkous (6) apporte un éclairage admirable sur l’essence des fêtes juives :

  • la fête de Pessah représente la naissance nouvelle de l’homme car il est sorti de l’esclavage.
  • Shavouot est l’étape de la Bar Mitsva car c’est le moment où le peuple juif reçut la Torah et devient un homme nouveau.
  • La Soucca rappelle la ‘Houpa, l’union sacrée entre un homme et sa femme
  • et Shemini Atseret symbolise le moment où les époux quittent la ‘Houpa pour se retrouver. La mariée se pare de bijoux et d’ornements pour plaire à son époux durant les Noces. Mais une fois que la cérémonie est passée, elle n’a plus besoin de ces accessoires car les époux sont déjà̀ attachés. Une fois que le lien est établi, il n’y a plus besoin de parade. C’est la raison pour laquelle la fête de Shemini Atseret n’est pas marquée par des évènements particuliers.

Tout nous parle de Yeshoua notre Messie qui nous réunira dans Sa présence.
Il viendra chercher Son épouse et introduira les noces de l’Agneau.
Ce sera un jour rempli de gloire unique. 

Notes

(1) Les quatre espèces (hébreu : ארבעת המינים, arba’at haminim) désignent quatre végétaux mentionnés dans la Torah comme l’une des prescriptions majeures et caractéristiques de la fête biblique de Souccot. Elles doivent, selon la tradition juive rabbinique, être rassemblées en faisceau, portées (hébreu : נטילת לולב netilat loulav) et balancées lors de la récitation du Hallel et des hoshaanot au cours des sept jours de la fête.

(2) Un homme racha (pluriel Réchaïm) n’a pas ou plus la crainte de D.ieu et fait le mal.

(3) Chem Michemouel est un recueil d’essais sur la Torah et les fêtes juives écrits par Rabbi Chemouel Bornstein et le rabbi de Sochaczev en Pologne. Le lecteur à la recherche d’un dvar Torah pour la table de Shabbat et l’érudit intéressé par une compréhension plus profonde d’un concept de la Paracha trouveront chacun dans cette ouvrage une ressource inestimable et essentielle.

(4) Le Gaon de Vilna  — Le Génie de Vilna — simplement par son acronyme hébraïque HaGRA (HaGaon Rabbénou Eliyahu – Notre Maître Élie, le Génie, (הגר »א (הגאון רבינו אליהו) (Vilna, 1720 – 1797), est l’un des représentants les plus éminents de la période des Aharonim (autorités juives à partir des temps modernes), au point d’être considéré par de nombreuses autorités ultérieures comme un Rishon (autorités juives médiévales, dont les opinions ont préséance sur celles des Aharonim).

Doué dans l’ensemble des savoirs juifs traditionnels (Talmud, Halakha, Kabbale) et dans les sciences profanes dès son plus jeune âge, il devient le chef de file des Mitnagdim (opposants) au hassidisme.

Le judaïsme hassidique ou hassidisme (hébreu : חסידות ‘Hassidout, « piété » ou « intégrité », de la racine חסד « générosité ») est un mouvement de renouveau religieux, fondé au 18e siècle en Europe de l’Est. Par rapport aux autres haredim, les hassidim insistent particulièrement sur la communion joyeuse avec D.ieu, en particulier par le chant et la danse.

(5) Mitzvah (en hébreu : מצווה ; au pluriel, mitzvot) signifie prescription (de צוה, tzavah, qui veut dire « commander »). Il s’agit des prescriptions ou commandements contenus dans la Torah, dont la tradition rabbinique estime le nombre à 613, soit la Loi juive elle-même.

(6) Le Rav Pinkous était connu pour son amour ardent pour la Torah. La flamme qui caractérisait ses discours, dans lesquels il éveillait les Juifs à la Torah et au service Divin, se transformait en lave brûlante lorsqu’il accomplissait les Mitsvot. Toute Mitsva, entre l’homme et son prochain, ou entre l’homme et D.ieu, prenait un sens extraordinaire chez lui ; il s’y consacrait de toutes ses forces et ne délaissait aucun effort au monde pour l’accomplir parfaitement. Il consacra une partie importante de sa vie à la prière, définie par nos Sages (Brakhot 6b) comme « une chose au sommet du monde et méprisée par les hommes ».

Retour en haut